- QUI PEUT SE MARIER ?
L’article 143 du Code civil dispose que « le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe ».
La loi du 17 mai 2013 a ouvert le mariage aux couples de même sexe.
Toutefois, en pratique, des interrogations et difficultés peuvent se poser.
- LE REFUS DE CELEBRER UN MARIAGE HOMOSEXUEL PAR UNE MAIRIE EST-IL LEGAL ?
Le refus de célébrer un mariage ne doit pas être discriminatoire : le refus de marier un couple de même sexe, parce qu’iels sont de même sexe, est interdit. La mairie ne peut refuser de célébrer un mariage que si les formalités administratives requises par le Code civil n’ont pas été effectuées ou s’il existe une opposition régulièrement formée ou des empêchements à mariage. Dans un tel cas, seul·e le/la procureur·e de la République peut s’opposer au mariage s’il peut être atteint par une cause de nullité, et il appartient au/à la maire de saisir le/la procureur·e. Iel doit avertir de sa démarche, par écrit, les personnes ayant déposé le dossier de mariage. Si un·e maire refuse un dossier de mariage sans prévenir immédiatement le/la procureur·e, les futurs époux ou épouses doivent alerter à la fois le/la préfet et le/la procureur·e de la République.
Procédure : Après la saisine du/de la maire (ou de l’officier·e d’état civil), le/la procureur·e de la République a 15 jours pour décider si le mariage sera célébré ou non. Il peut faire procéder à une enquête et décider de repousser la célébration, dans l'attente des résultats, le report est alors de 2 mois maximum (1 mois renouvelable 1 fois).
Passé ce délai, le/la procureur·e de la République fait connaître par une décision motivée s'iel laisse procéder au mariage ou s'iel s'oppose à sa célébration. S'iel autorise le mariage, la mairie sera obligée de célébrer le mariage. Dans le cas inverse, les personnes souhaitant se marier peuvent contester cette décision devant le tribunal. Celui-ci statue sous 10 jours et si le tribunal confirme l'interdiction du mariage, il n'y a pas d'autre recours possible.
Le refus de célébration de la mairie sans saisine du/de la procureur·e de la République constitue une « voie de fait », c’est-à-dire une atteinte grave portée à une liberté fondamentale et une décision de l’administration manifestement insusceptible de se rattacher à l’exécution d’un texte législatif ou réglementaire. La conséquence de cette qualification de voie de fait est de rendre possible une saisine du/de la président·e du tribunal judiciaire en référé. Une décision pourra être rendue en urgence. Ainsi, le/la juge des référés pourra ordonner au/à la maire de procéder à la célébration du mariage sans délai, éventuellement sous astreinte.
- QUELLES SONT LES SANCTIONS PÉNALES ?
L’officier·e d’état civil qui refuserait de célébrer un mariage, en dehors des hypothèses légales où les conditions du mariage ne sont pas remplies, s’expose à des poursuites pénales, à deux titres :
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d’une part, l’article 432-1 du Code pénal dispose que « le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique, agissant dans l’exercice de ses fonctions, de prendre des mesures destinées à faire échec à l’exécution de la loi est puni de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende » ;
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d’autre part, l’article 432-7 du Code pénal dispose en substance que la discrimination consistant à refuser le bénéfice d’un droit accordé par la loi commise par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, est punie de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.
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- POUR LES COUPLES BINATIONAUX, EST-IL POSSIBLE DE SE MARIER ?
Le Code civil prévoit la possibilité de se marier pour deux personnes de même sexe lorsque, pour au moins l'une d'elles, soit sa loi personnelle, soit la loi de l'Etat sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet.
Certaines conventions bilatérales prévoient l’application de la loi de la nationalité de chacun·e des époux·ses (ex : convention France-Pologne, convention France-Maroc…) et écartent donc la dérogation prévue par le Code civil. Le mariage avec les ressortissant·es de ces pays serait alors prohibé, violant ainsi le principe d’égalité, le principe de non-discrimination et le droit au mariage.
Toutefois, une dépêche du Garde des sceaux a été diffusée aux parquets généraux le 5 août 2016, invitant les parquets à ne plus s’opposer à ce type de mariage dès lorsque celui-ci est permis pour au moins l’un·e des deux époux·ses, soit du fait de sa loi personnelle, soit du fait de la loi de l’État sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence (la France, par exemple), c’est-à-dire les conditions posées par le deuxième alinéa de l’article 202-1 du Code civil. Cette consigne s’applique y compris lorsque l’un·e des époux·ses est originaire de l’un des pays avec lesquels la France a passé des conventions bilatérales (Algérie, Cambodge, Kosovo, Laos, Macédoine, Maroc, Monténégro, Pologne, Serbie, Slovénie, Tunisie).
- UNE PERSONNE EN SITUATION IRRÉGULIÈRE PEUT-ELLE SE MARIER EN FRANCE ?
Le mariage avec une personne sans-papiers est possible mais il est en pratique rendu difficile par des enquêtes réalisées dans un climat de suspicion autour des « mariages blancs ou gris ». Ceci n’est au demeurant pas propre aux mariages des couples de même sexe. Ainsi, l’officier·e d’état civil qui auditionne les futur·es époux·ses peut, s’iel l’estime nécessaire, demander à s’entretenir séparément avec l’un·e et/ou l’autre pour vérifier les intentions du couple. Le dossier peut ensuite être transmis au/à la procureur·e de la République qui décidera ou non d’interdire la célébration. Il faut alors contacter en toute urgence un·e avocat·e spécialisé·e en droit des étrangers.
- QUE FAIRE SI LE PAYS DE RESIDENCE INTERDIT LE MARIAGE ENTRE PERSONNES DE MEME SEXE ?
En principe, le mariage est célébré dans la commune où l’un·e des époux·ses à son domicile. Toutefois, la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe prévoit que « lorsque les futurs époux de même sexe, dont l’un au moins a la nationalité française, ont leur domicile ou leur résidence dans un pays qui n’autorise pas le mariage entre deux personnes de même sexe et dans lequel les autorités diplomatiques et consulaires françaises ne peuvent procéder à sa célébration », le mariage peut être célébré en France :
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dans la commune de naissance ou de dernière résidence de l’un·e des époux·ses ou de la commune dans laquelle un de leurs parents a son domicile ou sa résidence ;
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sinon la commune de leur choix.
En cas de refus par les autorités consulaires françaises de délivrer un visa à la personne étrangère souhaitant se marier avec un·e Français·e et résidant dans un pays où le mariage n’est pas possible, il est possible de saisir le tribunal administratif en urgence par un référé-liberté en invoquant la liberté fondamentale de se marier.
Enfin, des difficultés peuvent apparaître lorsqu’un·e étranger·e résidant en France souhaite se marier à un·e ressortissant·e français·e et n’est pas en mesure de produire un certificat de coutume délivré par les autorités consulaires de son pays d’origine car l’homosexualité y est interdite. Dans ce cas, la circulaire de présentation du mariage pour tous du 29 mai 2013 a prévu des adaptations spécifiques à la liste des pièces à fournir aux services de l’état civil des mairies.
En cas de difficulté juridique, il est fortement recommandé de prendre contact avec une association spécialisée et un·e avocat·e spécialisé·e en droit des étrangers.
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- TEXTES DE LOI ET RÉFÉRENCES :
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Articles 63 à 76 du Code civil (actes de mariage)
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Articles 143 à 164 du Code civil (qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage)
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Articles 165 à 171 du Code civil (formalités relatives à la célébration du mariage)
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Loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République (audition des futurs époux article 35)
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Circulaire du 29 mai 2013 de présentation de la loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe
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Réponse ministérielle du 20 janvier 2015 relative aux « mariages gris »
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Circulaire du 23 juillet 2014 relative à l'état civil
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Circulaire du 26 juillet 2017 relative à diverses dispositions en matière de droit des personnes et de la famille de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 (la constitution du dossier de mariage)
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CE 9 juillet 2014, n° 382145, Mbaye c/ Consul général de France à Casablanca
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Comment être soutenu·e par SOS homophobie ?
Si vous pensez avoir été victime ou témoin de LGBTIphobies et que vous avez besoin d’être écouté·es ou que vous vous posez des questions, vous pouvez contacter l’un des dispositifs d’écoute de SOS homophobie : une ligne d’écoute anonyme tenue par des bénévoles spécialement formé·es au 01.48.06.42.41, un chat’écoute et un formulaire de témoignage accessibles sur le site internet www.sos-homophobie.org.
Vous pouvez trouver des conseils pratiques grâce à une interface d’aide en ligne sur sos-homophobie.org/aide-en-ligne. SOS homophobie propose également un accompagnement juridique personnalisé.